Il y a un abri au fond du parc
loin des regards
le chemin pour s'y rendre
est parsemé de rencontres
les détours sont nombreux
la ligne droite se fragmente
éclate en une multitude
dont chaque point est un monde
qui se cache se révèle
s'enfuit s'abandonne
se délite se reconstruit
le chat au regard d'or
m'accompagne à travers ces hasards
au revers d'un regard
il est ombre immense
devant la fenêtre du château
bonjour jeune homme
avez-vous vu l'arbre
qui s'enfuit jusqu'aux racines
la bouche énorme formule
le point d'interrogation
l'hameçon qui se cisèle
sur l'établi du verbe
l'ombre grandit
se blottit dans l'oiseau
qui s'envole en hurlant
bonjour qui es-tu
un pèlerin qui marche
sur des crêtes qui s'inventent
un souffle qui frôle les hautes herbes
une souche toujours en croissance
sans attache toujours en errance
pour alerter le pied du marcheur
provoquer la chute
le nez sur la terre humide
j'écoute le crapaud
il dit la longue attente
l'accouplement qui n'en finit pas
le rêve de l'homme
qui passe
le trébuchement
danse maladroite et pleine de grâce
je me mêle à son pas
qui me mène à l'oubli
le but
j'entre dans l'antre
sous la toile
qui accueille la couleur et le trait
le mouvement qui sculpte l'air
les pigments accrochent le regard
promesse de velours sur la peau de papier
la multitude des traces
tisse sur le sol un maillage de désirs
je m'y perds tandis que la terre
se colore de l'alchimie des voyages
la feuille sur le bois se creuse
elle est le puits
d'où surgissent les masques
les totems la branche le caillou
la géométrie
le temps qui construit son architecture
voute splendide sous laquelle
résonne
la clameur
le chant
des guerriers qui accourent
au combat
une âpreté joyeuse
comme la morsure de l'amour
tourne autour de la béance rouge
le haut-four
dans la flamme qui coule
les sorcières s'amusent et prédisent en riant
le destin de l'homme aveuglé par les mots
les furies prennent le fouet pour pinceau
flagellent la toile qui accueille
la rage et la tendresse
le rire et le pleur
le pantin à l'œil torve
cherche son axe
sur les scènes qui se montent
se démontent se brisent et se consument
dans l'incandescence des ventres
il fait noir dans ces nuits orageuses
les foudres s'abattent
verticales bleues
j'appelle
des eaux calmes
pour rafraichir les idoles
le silence pour apaiser
la frénésie qui me possède
la grande baleine
qui balance en pleurant
des claques de douceur
sur la face de l'idiot
à genoux
maculé de sensations
Philippe M A S S A